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Fiscal

Revenus fonciers

Factures dissociées mais travaux indissociables

Des travaux peuvent être regardés dans leur ensemble comme des travaux d’agrandissement et de reconstruction, y compris lorsque les contribuables présentent des facturations dissociées pour les parties déjà utilisées en logements et pour celles résultant d’un agrandissement de surface et d’une nouvelle affectation.

Certaines dépenses de travaux réalisés sur des immeubles procurant des revenus imposables sont déductibles du revenu foncier de leur propriétaire. Ces charges déductibles comprennent notamment, pour les propriétés urbaines, les dépenses de réparation et d’entretien effectivement supportées par le propriétaire et les dépenses d’amélioration afférentes aux locaux d’habitation, à l’exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement (CGI art. 31).

Doivent être regardés comme des travaux de reconstruction ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d’habitation ou qui ont pour effet d’apporter une modification importante au gros œuvre, ainsi que les travaux d’aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et comme des travaux d’agrandissement ceux qui ont pour effet d’accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants. Des travaux d’aménagement interne, quelle que soit leur importance, ne peuvent être regardés comme des travaux de reconstruction que s’ils affectent le gros œuvre ou s’il en résulte une augmentation du volume ou de la surface habitable.

Lorsque des dépenses de nature différentes sont réalisées simultanément, le caractère déductible de chacune des catégories de dépenses dépend de leur caractère dissociable ou indissociable. Lorsque les dépenses de travaux sont dissociables, techniquement et fonctionnellement, le caractère déductible des dépenses engagées s'apprécie indépendamment, catégorie par catégorie. Lorsqu'elles ne le sont pas, le caractère déductible s'apprécie, en principe, globalement.

En l'espèce, des contribuables propriétaires d’un ensemble immobilier classé à l’inventaire des monuments historiques et affecté pour partie à l’habitation et pour partie à usage professionnel avaient fait réaliser des travaux sur leurs logements. Ces dépenses avaient généré un déficit foncier, qu'ils avaient imputé sur leur revenu global ; déduction que l'administration fiscale avait remise en cause, au motif que les travaux correspondaient à une opération de construction ou de reconstruction.

Ces travaux avaient consisté :

-au rez-de-chaussée, à créer un logement à la place d'anciens garages ;

-au 1er étage, à transformer deux bureaux en logements et à subdiviser un lot en deux logements ;

-aux derniers étages, à créer 3 nouveaux logements.

Ils avaient ainsi conduit à divers aménagements internes et à la redistribution de l’espace intérieur de tous les niveaux de l’ensemble immobilier formé, à l'issue de l'opération, de 7 logements contre 4 initialement. Outre une importante modification de la consistance des locaux, ils avaient par ailleurs entraîné la création de nouvelles surfaces habitables sur des emplacements de jardins, garage et escaliers.

Les juges d'appel confirment la position de l'administration. Eu égard à leur nature et à leur ampleur, les travaux en cause devaient être regardés dans leur ensemble comme des travaux d’agrandissement et de reconstruction, quand bien même les intéressés avaient présenté des facturations dissociées pour les parties déjà utilisées en logements, d’une part, et pour celles résultant d’un agrandissement de surface et d’une nouvelle affectation, d’autre part.

Par ailleurs, les contribuables entendaient se prévaloir du bénéfice du régime applicable aux propriétaires de monuments historiques, permettant d'imputer un déficit foncier sur le revenu global sans limitation de montant (CGI art. 156). Toutefois, cet avantage est conditionné à un engagement de conservation de la propriété pendant une période d’au moins 15 années à compter de son acquisition, y compris quand celle-ci est antérieure au 1er janvier 2009 (CGI art. 156 bis). Tel n’était pas le cas en l’espèce dès lors que, 4 ans après l’acquisition, un acte d’échange de lots avec une SCI, comportant le versement d’une soulte pour permettre la réalisation des travaux, avait été conclu.

Dès lors, les intéressés ne pouvaient pas imputer leur déficit foncier sur leur revenu global sans limite de montant, quand bien même l’échange ne portait que sur quelques mètres carrés.

Pour aller plus loin :

Revenus fonciers, RF 1122, §§ 465, 487 à 489 et 905

CAA Nantes 10 décembre 2021, n° 20NT02768